Encyclopédie, 1751

Le pain c’était la vie, la seule alimentation parfois des populations Le meunier autrefois était un artisan travaillant à façon. Son activité consistait à transformer le grain qu’on lui apportait en farine et parfois même à la livrer. Mais en aucun cas, il ne pouvait vendre directement sa mouture.
La construction du moulin, l’achat du matériel  et l’entretien sont très couteux, les rendements peu fiables . Seuls les seigneurs et les ordres religieux pouvaient en supporter la charge financière: ils affermaient le bâtiment et quelques parcelles autour. Le droit de ban leur fournissait un monopole et donc une clientèle captive.

Un moulin ne fonctionne pas toute l’année, il est tributaire des conditions météorologiques: gel, sécheresse ou crues., absence de vent ou tempête.
Diouz an dour eo mala: selon l’eau, il faut moudre
Va milin n’he-deus ket dour a-walh / evid mala hoh arreval: mon moulin n’a pas assez d’eau pour bien moudre votre mouture
Dour a red/ dour a led: eau qui court, eau qui s’étale (l’étang se remplit)
Le moulin ne constitue donc pas le seul revenu du meunier qui exploite aussi, souvent,  en complément quelques prairies et bois lui permettant un peu d’élevage ; avec le son, il élève aussi oies et canards pour les vendre au marché.  Il bénéficie aussi des poissons de l’étang. Le moulin est donc souvent entouré de bâtiments agricoles (crèches, granges, soues…) ou consacrés à d’autres activités (four, tissage…).

Le bruit était omniprésent dans le moulin. Le son incessant des rouages qui s’entrechoquent perturbait le sommeil de ses habitants. La chute d’eau ou le frémissement des ailes, le « tic-tac » des engrenages, la rotation sourde des meules écrasant le grain, le roulement des poulies et des courroies…, tout ce bruit faisait partie de l’activité quotidienne du moulin. Le meunier pouvait même juger du bon fonctionnement de son moulin en étant attentif au bruit qu’il produisait. Quand il arrivait qu’une dent en bois casse, on entendait par exemple un « tac! tac! tac! ». Il fallait alors agir très vite sinon toutes les dents y passaient.

Une grande variété de céréales  ont  servi à une époque ou à une autre à produire de la farine. Jusqu’au XIe siècle, il y avait trois cultures principales : l’épeautre, le seigle et l’orge. Par la suite, une plus grande maîtrise des cultures a permis le développement de l’avoine et du froment. L’avoine donnait une farine médiocre et un pain indigeste.
Naturellement le froment, qui fournit la meilleure farine, a progressé. Une autre plante, le sarrasin, difficilement panifiable est surtout utilisé pour les crêpes et les galettes.

Légende ou réalité, les meuniers ont aussi  la réputation d’être des ivrognes, des coureurs de jupon et des voleurs qui prélèvent plus que leur part du 1/16 des grains donnés à moudre. Le recteur de Plouzané, Clet de Keraudy, demande à ses paroissiens en 1701 « de prier Dieu même pour les meuniers » . Au milieu du XIXe la religion n’est toujours pas la préoccupation principale des meuniers : « Les gars au bonnet de coton enfariné ont tant de péchés sur la conscience qu’ils attendent prudemment le dernier jour de la semaine du temps pascal pour aller se confesser et faire leurs Pâques. C’est le jour des meuniers ! ». Les meuniers étaient souvent en butte à l’hostilité des villageois, qui ne voyaient en eux que des voleurs qui ponctionnaient plus que leur dû: bien des cahiers de doléances ou des dictons en témoignent.
eur miliner laer ar bleud /a vo daoned beteg e vleud : Le meunier voleur de farine, sera damné jusqu’au pouce

N’eus ket taerroh evid roched eur miliner; rag bep mintin e pak eul laer: Il n’y a pas de chemise plus courageuse que celle du meunier: chaque matin elle ceint un voleur!

Les privilèges seigneuriaux ont souvent profité largement aux meuniers qui deviennent parfois de petits notables paysans. Les moulins, constituent des lieux de rencontre, d’information et de commérage. Les meuniers, tout comme les tailleurs, servent à l’occasion d’intermédiaires dans les arrangements de ventes ou des prêts, ainsi que dans les préliminaires de mariages.

Dans les recherches généalogiques on rencontre parfois de véritables dynasties de meuniers. Ainsi à Locmaria, la famille Can est présente au moulin du Brennic dès avant la Révolution. Elle s’allie à la famille Kérébel dont certains membres sont en 1840 propriétaires du moulin  du Brennic, des 2 moulins du Créac’h et du moulin à vent de Ru vras et en 1860 du moulin de Lesconvel .